ZAN : les grandes attentes du secteur immobilier autour de la loi Trace

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ZAN : les grandes attentes du secteur immobilier autour de la loi Trace

Les promoteurs immobiliers espèrent un rebond de leur secteur et de la production de logements grâce à l'assouplissement des normes ainsi que du dispositif du ZAN qui fait l'objet de la nouvelle proposition de loi sénatoriale dite Trace.

Exit le zéro artificialisation nette (ZAN) au profit de la « Trace », qui vise à instaurer une trajectoire de réduction de l'artificialisation concertée avec les élus locaux. C'est l'objectif affiché de la proposition de loi, déposée le 7 novembre 2024, par les sénateurs Guislain Cambier (Union centriste - Nord) et Jean-Baptiste Blanc (Les Républicains - Vaucluse).

Ce texte entend assouplir le calendrier et l'application de l'objectif ZAN en 2050, fixé par la loi Climat et résilience du 22 août 2021. Les sénateurs veulent notamment supprimer l'objectif de réduction de moitié de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers (Enaf) d'ici à 2031 qu'ils jugent inatteignable. Cette proposition de loi sera discutée au Sénat, en séance publique, les 18 et 19 février 2025.

Assouplir encore le ZAN

Or, plusieurs textes sont déjà venus modifier le dispositif ZAN jugé trop contraignant et complexe par les élus locaux, dont la loi du 20 juillet 2023, qui a notamment introduit une garantie de développement communal d'un hectare, et les trois décrets du 27 novembre 2023« Cette proposition de loi plus pragmatique, plus concrète, permettra à nos territoires, dans leur diversité, de porter demain leurs projets », promet Guislain Cambier. À l'heure où la France se trouve confrontée à une crise du logement et où l'effort de réindustrialisation nécessite des disponibilités foncières, ce nouveau texte paraît donc nécessaire pour les parlementaires. Il est aussi le bienvenu aux yeux des professionnels de l'immobilier réunis en décembre dernier, au Salon de l'immobilier d'entreprise (Simi) à Paris.

Un renchérissement du coût du foncier

Car le virage vers le ZAN, tel qu'édicté aujourd'hui, heurterait les ambitions de développement économique des territoires, épingle Christophe Bouthors, président du groupe Telamon, spécialisé dans l'immobilier logistique. « À la faveur de la mise en place de la loi ZAN, un tas de réglementations ont été modifiées, ce qui a très largement complexifié le montage des opérations », critique-t-il. « Les procédures sont de plus en plus complexes, de plus en plus longues, de plus en plus enchevêtrées. Auparavant, on sortait des opérations de plateformes logistiques en trois ou quatre ans. Aujourd'hui, on met plutôt entre cinq et dix ans », observe M. Bouthors. Il indique aussi faire face à une augmentation des recours contre les permis de construire, contre les installations classées (ICPE), « ou les deux, ce qui engendre beaucoup plus d'aléas dans les opérations ».

“ Cette proposition de loi plus pragmatique, plus concrète, permettra à nos territoires, dans leur diversité, de porter demain leurs projets ”Guislain Cambier, sénateurPar ailleurs, la loi ZAN actuelle « va rendre plus chers les actifs, mais aussi va permettre de solvabiliser des opérations sur les friches, donc il y a des externalités positives et négatives », admet Christophe Bouthors. Ce dernier se félicite par ailleurs du changement de nom sous l'acronyme Trace, proposé par les sénateurs, en considérant qu'atteindre le zéro artificialisation nette était « un coup de com' énorme ».

Constat de « suradministration »

Du côté des collectivités locales, Alexandre Follot, directeur général adjoint de la communauté d'agglomération de Sophia-Antipolis (Alpes-Maritimes) partage aussi le même constat de « suradministration » qui impacte la réalisation des projets d'aménagement. « Vous voulez construire aujourd'hui dans une commune, vous avez les plans de prévention des risques, le ZAN, les sujets des plans locaux d'urbanisme (PLU) et de la biodiversité. Et finalement, en additionnant les contraintes, vous avez des communes qui n'ont plus de capacité à construire », regrette-t-il. Avec des prix du foncier qui ont augmentéles territoires sont également, selon lui, confrontés à des concurrences d'usage entre implantations d'activités et production de logements.

Pour autant, Sophia-Antipolis continue de construire, tout en concentrant une surface de 2 400 hectares pour 90 % d'espaces verts : « Depuis 2017, près de 400 000 mètres carrés ont été construits à Sophia-Antipolis, dont environ 80 % de nouveaux projets réalisés, soit via la réhabilitation, soit la déconstruction-reconstruction ou les parkings souterrains. Nous sommes l'un des rares territoires sur la Côte d'Azur à continuer à produire du logement », se félicite-t-il. Ces chiffres, ajoute-t-il, montrent la volonté politique de la technopole en matière de sobriété foncière depuis 2017, bien « avant le ZAN ».

De son côté, Jean-Luc Porcedo, directeur général du pôle transformation des territoires chez le promoteur immobilier Nexity, s'interroge sur les ambitions réelles de la proposition de loi sénatoriale pour réduire l'artificialisation des sols. « La préservation des terres, la fin de l'extension de l'urbanisation, sont une nécessité par rapport aux enjeux environnementaux. La question aujourd'hui : est-ce que le Trace va remplacer le ZAN ? Les compteurs seront-ils remis à zéro ? » s'interroge M. Porcedo. De quoi entretenir le flou dans l'application des politiques d'aménagement du territoire.

Soutien aux maires bâtisseurs

Rappelons que depuis janvier 2024, une circulaire permet déjà aux préfets d'autoriser les collectivités à dépasser jusqu'à 20 % les objectifs de réduction de l'artificialisation prévus par le document d'urbanisme supérieur. Par ailleurs, sans renoncer à l'objectif de sobriété foncière, l'ancien Premier ministre, Michel Barnier, avait annoncé, le 20 novembre dernier, son soutien à la proposition de loi Trace.

En revanche, pas un mot sur le ZAN n'a été prononcé par son successeur François Bayrou, lors de sa déclaration de politique générale à l'Assemblée nationale, ce 14 janvier 2025. Toutefois, ce dernier s'engage à favoriser la construction de logements, en réduisant encore les délais, en allégeant les demandes d'autorisation d'urbanisme, ou encore en facilitant la densification et les changements d'usage. Le nouveau Premier ministre entend également « soutenir les maires bâtisseurs par un système d'encouragement à l'investissement, y compris privé ». En outre, il plaide pour l'adoption rapide par le Parlement du projet de loi de simplification de la vie économique. Ce texte propose notamment de ne plus comptabiliser l'artificialisation résultant des projets industriels.